BULLE ROSE N°10

LA CABINE

La Cabine est un lieu dans lequel on vient pour déposer son témoignage ou écouter des paroles enregistrées par d’autres. Les témoignages concernent des personnes qui vivent des violences dans leur intimité et leur quotidien que ce soit de genre, physique, psychologique ou verbale, raciale, de classe, morales, sexuelles, mobbing, domestiques... C’est une manière de construire une parole individuelle qui puisse raisonner collectivement.

C’est un projet collaboratif initié par Rebecca Bowring avec Sidonie Atge-Delbays, le collectif "la Bulle Rose" composé de Vanessa Ferreira Vicente & Marie Van Berchem, Ornella Caponi et Alizée Rambeaud.

Inspiration

Notre démarche est inspirée du « wind phone » créé au Japon en 2010. Après la mort de son cousin dont il était proche, le designer Itaru Sasaki fait installer une cabine téléphonique dans son jardin pour pouvoir lui parler quand la douleur du deuil est trop importante. Il décroche le téléphone et lui laisse des messages. Une fois déposés, ils sont emportés par le vent. Quelque temps plus tard, dans un village voisin, une catastrophe environnementale cause la mort de nombreux·ses villageois·es. Les survivant·es s’approprient alors le « wind phone », un outil précieux dans leur parcours de deuil et de résilience. Au Japon, cette cabine attire désormais beaucoup de personnes en quête de réconfort après un drame.

Ouvrir la voi(e/x)

Lors des manifestations féministes, on crie, on fait du bruit, on se réapproprie l’espace public et sonore. Ça nous libère et ça nous rassemble. On dit que la parole s’est libérée ou peut-être est-ce l’écoute qui a fait sa révolution. Quoi qu’il en soit, ces paroles sont galvanisantes, importantes, et la voix étant l’organe de la parole, nous avons besoin qu’elle soit réincarnée pour être mieux entendue. Nous pensons que la voix peut avoir un rôle important dans la prise de conscience collective de l’impact que produit la violence sur nos vies.

Il est nécessaire que les récits de personnes trop longtemps silenciées puissent être entendus et diffusés de manière sensible. Les voix doivent pouvoir exister bruyamment, être incarnées par des personnes reprenant possession de leur pouvoir d’agir et de l’unicité de leur trajectoire.

Bâtir une installation artistique tangible

“(...) L’expérience du sexisme est d’abord et avant tout une expérience quotidienne, vécue individuellement.”

Elsa Dorlin, Se défendre, une philosophie de la violence, p.151 Les violences de genre forment un continuum. Elles se retrouvent dans toutes les sphères de la société et se manifestent de multiples manières : physique, verbale, psychologique. Qu’elles soient visibles, marquent les corps, ou non, elles blessent, mutilent et tuent. Difficile à quantifier, les témoignages restent généralement cantonnés au cercle intime ou, dans le meilleur des cas, au cabinet d’un·e psychologue. Parfois, les personnes vivant de telles violences connaissent une honte si importante qu'elle les pousse tout simplement à se taire. C’est pourquoi, nous souhaitons que la Cabine soit une installation artistique tangible et matérielle qui donne une visibilité à ces violences dans l’espace public. Un lieu où l’on vient déposer des témoignages, ou en écouter, pour se

décharger, s’informer ou se reconnaître peut être, se donner de la force.
Une cabine téléphonique visible et accessible dans l’espace publique, 24heures/24, 7jours/7.

Précédent
Précédent

BULLE ROSE N°6 TOURNOI D'ÉCHECS FEMININ